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« Princesse Carnage », l’oxymore lumineux

     Le spectacle jeune public de la compagnie Noutique, représenté à « la Ruche » (Université d’Artois) le 27 mai dernier, n’est pas l’histoire d’une princesse comme les autres. Dès l’ouverture du rideau, le décor nous surprend avec un affichage en LED indiquant « Princesse Carnage » comme sur la devanture d’une taverne. Où se trouvent le somptueux château et la chambre toute rose d’une princesse ? En effet, le décor lugubre plonge le spectateur dans le trouble : un panneau de bois imite la pierre d’une grotte, et des projecteurs bleu nuit entourent la scène. Absolument rien de romantique, mais au contraire une atmosphère inquiétante.

     Heureusement, l’arrivée d’une princesse aux antipodes des croyances des petites filles va faire rire petits et grands : celle-ci est capricieuse, impatiente, râleuse… Elle se mouche dans sa robe et crache même par  terre ! Princesse  Carnage ne  correspond  donc pas  aux critères  attendus     d’une

« vraie » princesse, ni même d’une héroïne féminine : elle chante faux, elle n’est pas coquette et elle ne sait même pas marcher avec des talons ! Et comme elle ne voit pas arriver son prince charmant, elle décide de prendre les devants, et de partir à l’aventure le trouver elle-même ! Par le biais de cette prise de décision (va-t-elle partir ou non ?), le metteur en scène dénonce les stéréotypes que notre société patriarcale donne aux enfants. La femme devient, même dans un conte de fées, égale à l’homme, au sein du couple (la princesse est aussi courageuse que le prince), comme au sein de la société (Princesse Carnage va sauver sa famille de la méchante fée).

     Nicolas Fabas, le metteur en scène, n’hésite d’ailleurs pas à reprendre un personnage historique de l’émancipation de la femme à travers le costume de l’aviatrice Amélia Earhart, que porte Suzanne Gellée à la fin de la pièce. De plus, adapter cette scène aux enfants permet de leur faire découvrir une autre image des relations hommes-femmes que celle qu’ils ont dans les dessins animés, à l’âge où les jeunes filles et les garçons lient pour la première fois des liens dans le cadre extra-scolaire.

 

     Car ce spectacle ne traite pas seulement du débat actuel sur l’égalité homme/femme, il fait aussi l’éloge de l’amitié : habituellement, l’ogre qui garde la grotte où est enfermée la jolie princesse est méchant et fait peur aux enfants. Ici, Youpi, le gentil yéti, s’inspire des anti-héros que l’on retrouve également dans les films d’animation comme Monstres & Cie, ou Shrek. Le conflit issu des deux personnalités contradictoires (la princesse capricieuse et le monstre serviable) crée un comique irrésistible, et les deux personnages destinés à s’affronter finissent par s’entendre comme les meilleurs amis du monde.

     Pièce comique, « Princesse Carnage » est aussi un éloge de la différence, dans lequel les acteurs Suzanne Gellée et Nicolas Fabas, sous la direction de Clément Bailleul, ne ménagent pas leur peine ! Leurs prouesses vocales et scéniques feront à coup sûr rire le jeune public. Mais les situations et les références culturelles feront tout autant sourire un public plus âgé, sur un sujet controversé, abordé avec humour et brio.

     On attend avec impatience le deuxième volet de cette aventure pour la fin de l’année 2016

 

Flora Cerda (1ère ES)

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